Une agriculture à l'image de l'être humain
Lorsque le 2 octobre 1999, pour le 20ème anniversaire de L'Aubier, nous semions ensemble et à la main un champ de blé. Nous étions en droit de dire: déjà 20 ans !
Mais cette période, un peu moins d'une génération, ne représente en fait qu'un fugitif instant pour l'agriculture. Qu'ont donc comme histoire les graines que nous semons? Le blé est devenu une plante cultivée il y a environ 10'000 ans. Depuis, il y a eu une chaîne ininterrompue de semences à travers les années, les générations, les cultures, les peuples et les époques. Une chaîne de vie n'a pas le droit de se rompre, et celle des semences tient depuis des milliers d'années. Nous vivons tous au sein de ce courant, et formons, nous aussi, un pont entre un immémorial passé et un lointain futur. C'est pour cela que ces insignifiantes vingt années deviennent importantes pour l'ensemble du cycle de la vie.
Les soins à la terre
L'agriculture a pour mission de cultiver la nature, de travailler le sol, les plantes et les animaux. Là où la nature a terminé son rôle, commence celui de l'agriculteur comme formateur de paysages, sélectionneur de plantes, éleveur d'animaux. C'est lui qui réunit tous ces facteurs dans un organisme agricole constitué.
Notre époque exige maintenant l'étape suivante dans le développement de cette nature. Deux chemins s'offrent à nous. D'un côté, la manipulation génétique : on travaille sur le microscopique pour modifier d'importants liens biologiques. La chose est très intelligente mais dénuée de vue à long terme. La technique Terminator montre clairement la direction que prend ce chemin : les plantes manipulées produisent juste avant la récolte une enzyme qui annule la possibilité germinative du grain mûr. Ainsi après leur récolte les grains ne peuvent plus être gardés comme semences car ils sont stériles. Ils sont morts comme des pierres. Cela place l'agriculteur dans une totale dépendance des producteurs de semence telle la firme Monsanto.
De l'autre côté, il y a le développement de la nature conduit par l'être humain grâce à l'agriculture bio-dynamique. 'Bio' pour une relation de respect et de ménagement du sol, des plantes et des animaux, par l'exclusion d'engrais chimiques, de pesticides et de fourrage industriel. 'Dynamie' pour un pas de plus: la nature agricolement exploitée doit aussi pouvoir être développée dans un cheminement conscient. C'est le but du bio-dynamiste que de réveiller le potentiel de vie des êtres vivants. Pour cela il ne part pas du détail comme le fait le génie génétique, mais il se base sur un développement global à l'intérieur du cycle fermé que représente le domaine agricole. Ainsi, la ferme devient un organisme, il se créé une unité vivante entre le sol, les plantes et les animaux. Si dans cet organisme on introduit les préparations bio-dynamiques, l'aspect fermé de ce cycle devient alors la base d'une ouverture. Les êtres vivants commencent à entrer en correspondance avec les forces cosmiques et les forces terrestres.
Un accès à des forces vives s'ouvre. Sur terre le pas s'accomplit qui va de la sauvegarde de la nature à son développement. L'être humain assume sa position dominante envers la nature lorsqu'il la prend avec lui dans son développement culturel. Il devient en quelque sorte un entrepreneur spirituel et prend le relais de la Création.
La production de denrées alimentaires
La seconde mission de l'agriculture est de répondre à la demande de la société d'organiser la production de denrées alimentaires et de matières premières. A ce niveau, l'agriculture de la fin de ce siècle est sur le point de se briser. Les prix bradés du marché mondial pour les denrées de masse entraînent la ruine d'agriculteurs, de fermes, voire de villages, et les consommateurs dans les pays industrialisés ont encore le choix entre la viande de vaches folles et celle de poulets à la dioxine... L'agriculture est devenue en même temps une quémandeuse de subventions et la responsable d'imprévisibles scandales. De là on peut conclure que:
1. Si on exige de l'agriculture qu'elle fonctionne d'après des critères industriels, elle fait faillite. Elle fonctionne exactement à l'inverse de l'industrie. Elle travaille à partir de l'ensemble de la nature pour élaborer un produit particulier. C'est ainsi qu'elle devrait être la partenaire économique complémentaire de l'industrie et non son semblable.
2. Les produits sont des denrées alimentaires de la plus haute sensibilité. Par rapport à cela, seule une stratégie pour l'obtention d'une qualité maximale doit entrer en ligne de compte.
À L'Aubier, le travail biodynamique quotidien sur les quelques 40 hectares de notre ferme est un devoir de haute exigence. Pratiquer la biodynamie signifie pour nous:
- Réaliser la responsabilité de l'homme envers la terre.
- Dépasser l'isolation de l'agriculture par l'association avec d'autres secteurs d'activités.
- Produire, transformer et vendre des denrées alimentaires de la plus haute qualité garanties par le label 'Demeter'.